Dans l’actualité santé en Afrique cette semaine, les débats se concentrent sur la souveraineté sanitaire, les innovations médicales et la résilience des systèmes publics. En Afrique du Sud, la “Promesse de Durban”, menée par l’Africa CDC, appelle à une Afrique autonome dans la production de vaccins et le financement de la santé. En Zambie, plus de 500 000 enfants vont bénéficier du vaccin antipaludique R21/Matrix-M. Au Maroc, un plan d’urgence vise à redresser les hôpitaux publics en crise, tandis que la start-up ivoirienne Ruche Health est récompensée par le Prix Galien pour son innovation numérique en santé . Au Sénégal, des chercheurs plaident pour un fonds africain de recherche, et au Soudan du Sud, l’épidémie de choléra met en lumière un système sanitaire en déroute. Enfin, une étude prône l’intégration des guérisseurs traditionnels dans la riposte au mpox.
Afrique : intégrer les guérisseurs traditionnels dans la riposte au mpox
Une étude publiée dans PLOS Neglected Tropical Diseases préconise l’intégration des guérisseurs traditionnels dans la réponse sanitaire africaine face au mpox. Ces praticiens constituent le premier recours pour 58 % de la population africaine en cas de maladie fébrile.
Entre janvier 2022 et septembre 2025, près de 5500 cas et 239 décès ont été enregistrés dans 30 pays africains, avec la RDC comme épicentre.
Les auteurs identifient des défis majeurs : retards de diagnostic, non-respect des mesures de prévention et diffusion de désinformation. Cependant, former les guérisseurs à l’identification précoce des symptômes, établir des protocoles de référencement vers les structures biomédicales et leur fournir des outils de prévention pourraient transformer ces praticiens en alliés stratégiques. Cette approche reconnaît leur importance culturelle tout en renforçant les systèmes de santé. L’étude propose ainsi une stratégie unifiée et culturellement adaptée pour gérer le mpox et futures urgences sanitaires.
Afrique : la souveraineté sanitaire au cœur de la “Promesse de Durban”
Réunis à Durban pour la 4ᵉ Conférence internationale sur la santé publique en Afrique (CPHIA 2025), plus de 20000 acteurs de la santé, chercheurs et décideurs ont adopté la “Promesse de Durban”, un engagement fort vers l’autonomie sanitaire du continent, selon Africa CDC (Centres africains de contrôle et de prévention des maladies), agence sanitaire de l’U.A.
Face à une hausse de 40 % des urgences sanitaires depuis 2022 et à la baisse du financement extérieur, l’Afrique veut désormais fabriquer ses vaccins, financer ses systèmes et renforcer ses soins primaires. Les priorités définies portent sur cinq axes : production pharmaceutique locale, financement innovant, transformation des soins de santé primaires, préparation aux pandémies et gouvernance des données.
Zambie : vaccination antipaludique pour plus de 500 000 enfants
La Zambie a intégré le vaccin antipaludique R21/Matrix-M à son Programme élargi de vaccination, devenant le 24ème pays africain à franchir ce cap. La première phase cible plus de 500 000 enfants âgés de six à huit mois dans 83 districts, dont 79 à forte endémie palustre, rapporte Agence Ecofin. Les cinq districts restants rejoindront le programme en 2026.
Cette initiative, soutenue par l’OMS, l’UNICEF et Gavi, répond à un fardeau sanitaire majeur dans le pays : en 2023, l’incidence du paludisme chez les moins de cinq ans atteignait 523 cas pour 1 000 habitants.
Le ministre de la Santé, Elijah Muchima, a salué ce déploiement national comme un « nouvel espoir » pour protéger les enfants et progresser vers une Zambie sans paludisme. Le Plan stratégique national 2022-2026 vise une couverture de 95 % des interventions antipaludiques, une réduction de l’incidence à 201 cas pour 1 000 et une diminution de la mortalité à 4,7 décès pour 100 000 habitants d’ici 2026.
Maroc : un plan d’urgence pour sauver l’hôpital public
Au Maroc, le ministre de la Santé, Amine Tahraoui, a dévoilé récemment un plan de redressement d’urgence du secteur hospitalier, face à la dégradation des infrastructures et à la multiplication des agressions contre le personnel médical.
Cette feuille de route, adoptée par le gouvernement, repose sur plusieurs axes : déploiement d’une nouvelle carte sanitaire pour optimiser la répartition des ressources, réhabilitation des établissements et modernisation des services d’urgence. Le plan prévoit également une réorganisation des circuits patients, distinguant cas critiques et non-urgents, ainsi qu’un renforcement de la présence médicale continue.
Une circulaire de 2025 impose désormais aux hôpitaux de mettre en œuvre des mesures de protection juridique et psychologique pour le personnel, avec des poursuites systématiques contre les agresseurs.
Dans le pays maghrébin, l’objectif en toile de fond est de restaurer la confiance dans l’hôpital public, après plusieurs scandales et manifestations publiques, et valoriser la dignité du corps médical.
Côte d’Ivoire : La Ruche Health remporte le Prix Galien Afrique
La start-up ivoirienne La Ruche Health, fondée par Rory Assandey, a été désignée lauréate 2025 du Prix Galien Afrique de la meilleure technologie et innovation médicale lors du Forum de Dakar cette semaine. Elle remporte, dans le cadre de cette compétition, une bourse de 20 millions FCFA.
Ruche Health connecte les populations marginalisées à des prestataires agréés. L’entreprise propose des services de santé mentale, sexuelle, reproductive et de soins primaires adaptés culturellement, en s’appuyant sur les sciences comportementales et les données temps réel. Depuis son lancement, la plateforme de santé numérique a touché plus de 75 000 utilisateurs en Côte d’Ivoire et au Sénégal.
Le Prix Galien Afrique, soutenu par la Gates Foundation et la Rockefeller Foundation, consacre l’excellence dans l’innovation pharmaceutique, biotechnologique et digitale sur le continent.
Cette distinction intervient lors de la 8ème édition du Forum Galien Afrique, réunissant 2 000 participants autour du thème de la souveraineté sanitaire africaine.
Sénégal : appel à la création d’un fonds africain pour la recherche
Toujours à la faveur du Forum Galien Afrique, la microbiologiste sénégalaise Lissa Kana plaide pour l’établissement d’un fonds continental dédié à la recherche et à l’innovation, destiné à renforcer l’autonomie sanitaire de l’Afrique. Selon elle, 83 % des financements consacrés à la recherche sur le continent proviennent de sources extérieures, freinant ainsi son indépendance scientifique.
« Nous devons disposer d’un fonds pour la recherche et d’un cadre réglementaire permettant aux bailleurs de soutenir les initiatives africaines sans créer de dépendance », a-t-elle déclaré lors d’un débat organisé par Speak Up Africa au Forum Galien Afrique.
La spécialiste recommande que chaque État membre de l’Union africaine consacre au moins 1 % de son PIB à la recherche, financé par les taxes et épargnes nationales. L’expert Serigne Bop ajoute que le continent doit passer du stade de projets pilotes à celui de l’innovation déployée à grande échelle, en développant des partenariats public-privé structurés.
Soudan du Sud : le choléra révèle des défaillances systémiques
Un an après la déclaration de l’épidémie, le choléra a causé plus de 1500 décès et infecté 93 000 personnes au Soudan du Sud. Cette crise sanitaire expose les vulnérabilités majeures dans le pays perturbé par les conflits : négligence systémique, violences incessantes et système de santé sous-financé.
Le gouvernement n’alloue que 2 % de son budget à la santé, ce qui rend le système incapable de gérer les besoins routiniers, encore moins une urgence épidémique.
L’afflux d’un million de réfugiés soudanais depuis avril 2023 a aggravé la pression sur des services déjà réduits par les coupes budgétaires des donateurs internationaux, dont l’USAID. Les camps de transit à Renk, débordant à 300 % de leur capacité, créent des conditions propices aux maladies hydriques. Médecins Sans Frontières (MSF), qui a traité 35 000 patients, a également subi huit attaques en 2025, ce qui a causé la fermeture de plusieurs centres.


